Quand je lis les nouvelles du monde, il m’arrive d’être saisi par un sentiment de découragement, et même parfois d’angoisse. Guerres, tueries, violence, abus, escroqueries… L’horizon de ma journée se trouve soudain fortement assombri par les nouvelles du monde que j’ai lues ou entendues. Il me vient parfois l’envie de fuir de ce monde et la compagnie des humains. Mais je crois que même le plus isolé, la réalité du monde me rattrapera encore. La réalité du Mal, qui assombri nos vies, et crée en nous découragement et angoisse ne peut se traiter par un simple déni. Il faut admettre et se confronter à la réalité.

Les textes bibliques que nous avons entendus nous invitent à plusieurs attitudes qui ne sont pas forcément contradictoires. Tous ont un point commun : ils nous rappellent que nous ne sommes pas éternels, mais que nous ne sommes que de passage sur cette terre. L’épître aux Hébreux rappelle que notre vie est un passage temporaire que nous faisons sur terre. Nous sommes des étrangers et des voyageurs, nous aspirons à notre véritable patrie qui est celle des cieux. Mais n’est-ce pas irresponsable d’affirmer cela ? Est-ce que cela ne pousse pas à considérer toute chose avec détachement ? Après moi le déluge.  Quelle implication de ma responsabilité si je ne suis ici qu’un étranger et un voyageur ? Suis-je vraiment concerné par ce qui se passe autour de moi, ou pour les autres ?

Jésus invite à la fois à se souvenir que notre vie est éphémère, que nous ne sommes que des étrangers et des visiteurs sur la terre (donc pas des propriétaires mais des gestionnaires à qui la création est confiée sans qu’elle leur appartienne). Mais en même temps à prendre au sérieux notre responsabilité et notre engagement. Jésus dit dans l’Évangile : « Que dire du serviteur fidèle et sensé à qui le maître a confié la charge des gens de sa maison, pour leur donner la nourriture en temps voulu ? Heureux ce serviteur que son maître, en arrivant, trouvera en train d’agir ainsi ! ». Cela nous vaccine de deux tentations :

Comme souvent en théologie, il ne faut pas résoudre la tension mais garder les deux et marcher sur cette ligne de crête entre les deux. L’image qui peut illustrer cette tension entre ici et au-delà, est celle de l’arbre. L’arbre est tendu vers le ciel, attiré vers la lumière. Mais il reste en même temps enraciné dans la réalité de la terre. Étrangers et visiteurs sur cette terre, nous ne sommes pas juste dans l’attente d’un ailleurs, d’un au-delà. Mais bien que tendus vers le Royaume, nous restons pleinement engagés ici et maintenant.

Textes du jour : Psaume 90, Hébreux 11, 13-16, Matthieu 24, 35-47