Semaine de prière pour l’unité des chrétiens

Voilà peut-être le cœur de ce que cherche à promouvoir chaque année la Semaine de Prière pour l’Unité des chrétiens.

Et je crois que l’apôtre Paul nous donne une très belle exhortation allant dans ce sens dans l’épître que nous avons entendue :

    les dons de la grâce sont variés,
mais c’est le même Esprit.
    Les services sont variés,
mais c’est le même Seigneur.
    Les activités sont variées,
mais c’est le même Dieu
qui agit en tout et en tous.
    À chacun est donnée la manifestation de l’Esprit
en vue du bien.

Entre les Eglises chrétiennes, je crois que nous pouvons, si vous le voulons, expérimenter cette réalité d’une unité dans la diversité. 

Parce que ce qui fait l’unité, c’est d’abord le Christ que nous confessons et sur lequel se fonde notre foi. Saint Jean nous rapporte à ce sujet la prière de Jésus : « Que tous soient un Père comme toi et moi nous sommes un. »

Cette unité pour laquelle nous prions – espérons non seulement une semaine en janvier, mais toute l’année – est d’abord un don qui se reçoit de celui qui est profondément un : Dieu.
Et tout en étant un il n’est pas moins trois : Père, Fils et Saint-Esprit. Échappant ainsi à toute tentative de rendre Dieu prisonnier de notre logique ou raisonnement humain. L’être même de Dieu est polyphonique. 

Pour en revenir à ce qu’enseigne l’apôtre Paul :
Les grâces sont variées
Les services sont variés
Les activités sont variées.

Il y a une diversité bénie qui combat toute tentative d’uniformisation. Car l’unité ce n’est pas l’uniformisation. L’unité n’est pas mise en danger ou menacée par une certaine diversité pour autant que le fondement soit un et commun.

Pour reprendre les mots de l’apôtre :
C’est le même Esprit.
C’est le même Seigneur.
C’est le même Dieu. 

Est-ce que la diversité signifie qu’il y aurait-il donc plusieurs vérités ? C’est très à la mode aujourd’hui de se dire qu’il y a plusieurs vérités… et que chacun a la sienne, que tout se vaut.

Non… il n’y a pas plusieurs vérités. Ce n’est pas le message de Jésus. Parce que la vérité ce n’est pas un concept ou une idée, mais à nouveau tout comme l’unité c’est une personne. C’est le Christ lui-même qui a dit : Je suis la vérité, le chemin et la vie, nul ne vient au Père sinon par moi.

En revanche, et pour reprendre un ouvrage d’un grand théologien jésuite du siècle passé, Hans Urs von Balthasar : « la vérité est symphonique ». Il déploie cette image musicale pour parler de la vérité et de l’Eglise.

Il est vrai qu’on peut être tenté de jouer toujours à l’unisson. C’est moins complexe, cela permet d’identifier plus facilement les fausses notes.
Mais c’est aussi moins beau, moins riche.
Dieu lui-même dans son être profond, dans son essence, a choisi de s’exprimer en trio.

La vérité est symphonique….
Cela ne veut pas dire que nous pouvons tous jouer la partition de notre choix, des partitions différentes dans l’orchestre. Sinon cela sera non plus une symphonie mais une cacophonie. 

Nous devons bien sûr tous jouer la même partition.
Cette partition dans la vie spirituelle c’est l’Ecriture, la Bible : Parole de Dieu.
Nous n’avons pas à improviser chacun dans notre coin. Le divin compositeur qu’est Dieu a donné la partition. La Bible est la partition de la vie chrétienne où est écrit l’œuvre symphonique que Dieu a composée pour nous.
Avoir cette partition et la déchiffrer c’est le point de départ.

Mais nous devons encore tous être accordés au même diapason. Car sinon, on reconnaitra sans doute le morceau… mais ça fera mal aux oreilles.
C’est le Christ qui nous donne le « la ». C’est sur lui que nous avons sans cesse à nous accorder et nous réaccorder. On ne perçoit pas toujours quand on se désaccorde… ce n’est qu’en revenant au « la » du diapason qu’est le Christ que nous pouvons mesurer si nous sommes désaccordés et corriger cela.
C’est pourquoi nous devons encore et toujours venir à lui. Et non seulement venir, mais encore écouter…

C’est ce à quoi nous invite la Vierge Marie dans le texte de l’Evangile, elle nous invite aller vers le Christ et à l’écouter. « Faites tout ce qu’il vous dira ! »
Nous devons nous mettre à l’école de Marie, dans cette écoute du Christ et de sa Parole. Depuis l’annonciation Marie ne cesse de nous enseigner l’importance de l’écoute… écouter le Christ.

Et de cette écoute fondamentale du Christ qui est le diapason pour nous accorder, nous devons aussi ensuite nous écouter les uns les autres. Si dans l’orchestre, tout le monde a la bonne partition, tout le monde est correctement accordé, mais que personne ne s’écoute…. Cela vire à la catastrophe. La semaine de prière pour l’unité des chrétiens est une occasion privilégiée d’entrainer notre oreille, d’exercer notre écoute de l’autre par les rencontres oecuméniques que l’Eglise catholique et l’Eglise protestante organisent.

Les musiciens le savent plus, plus on joue ensemble, mieux on se connait. Et mieux on se connait plus il devient facile de faire de la belle musique ensemble.

Écouter l’autre, avec son instrument différent, avec sa ligne mélodique différente… c’est cela qui donne toute la beauté à la musique symphonique. On se met à percevoir toute la cohérence de l’œuvre voulue par le compositeur. 

Reste encore à parler d’un élément indispensable de l’orchestre. Discret par son silence… il est central dans l’exécution de la musique, et pourtant est tout à fait silencieux. 

C’est bien sûr le chef d’orchestre… il ressemble à l’Esprit Saint qui donne les impulsions, le rythme. Il conduit et dirige… et pourtant est en silence. Cela demande au musicien de l’attention… il est vite fait de l’ignorer tout à fait.

Le chef d’orchestre qu’est l’Esprit Saint ne fait pas autre chose que de faire jouer la partition. Il ne s’écarte pas de la partition mais donne au musicien d’interpréter avec justesse.

Ainsi le Père a composé l’œuvre qui a été transmise dans la Bible qui est notre partition.
Le Christ est le diapason qui nous donne le « la » auquel nous accorder.
Et le Saint Esprit est le chef d’orchestre silencieux qui nous permet d’être ensemble.

Alors les conditions sont réunies pour jouer cette belle symphonie divine, avec tous les instruments différents. Différent… mais unifier dans une même mélodie !

Efforçons-nous, catholiques et protestants, de répéter ensemble… pour que nous apprenions à jouer ensemble de concert… à l’invitation de l’Esprit Saint.

(Ludovic Papaux)